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Innovation : les 6 peurs qui freinent les grandes entreprises

Innovation - les 6 peurs qui freinent les entreprises

Dans son ouvrage, « Lean Startup in Large Organizations », James Euchner, ancien vice-président chargé de l’innovation chez Goodyear, regrette le manque de prise de risques des grandes entreprises. Et recense « six peurs » qui empêchent ces mastodontes de faire montre de la même créativité, sur le terrain de l’innovation, que les start-up.

« Comprendre ses peurs afin de les surmonter. » Ce postulat particulièrement usité en psychanalyse s’invite, depuis peu, en entreprise. Ainsi, James Euchner, qui a longtemps présidé aux destinées de l’innovation chez le fabricant de pneumatiques Goodyear, s’est penché sur les « freins » qui empêchent les grandes entités de sortir de leur zone de confort.

« En se plaçant du point de vue du PDG, l’une des peurs que j’ai pu constater est que le processus d’innovation est perçu comme tellement dynamique que celui-ci pourrait mener l’entreprise à des résultats non anticipés. Le dirigeant s’évertue, inconsciemment, à tuer dans l’oeuf, l’ensemble du processus d’innovation », développe James Euchner. Et d’ajouter : « Il est, de ce fait, résolument important d’être très clair, d’emblée sur le cadre au sein duquel l’entreprise souhaite innover. »

Également en tant que professeur honoraire à l’Aston Business School de Birmingham, James Euchner regrette que la flexibilité et le dynamisme soient encore l’apanage des start-up. Et que les grandes entreprises demeurent engoncées dans leurs habitudes, ne disposant pas d’une marge de manoeuvre et d’une vitesse d’exécution idoine pour innover de manière aussi souple que leurs « petites soeurs », start-up.

Même si plusieurs facteurs doivent être pris en considération. « Il n’est pas possible de regarder de façon globale et indifférenciée le principe de résistance à l’innovation. Cela dépend des éléments impactés dans l’organisation. Tout le monde réagit de façon irrationnelle, il est important de se mettre dans la peau des individus pour mieux les comprendre », appuie James Euchner. Celui-ci ajoute néanmoins que, sur le terrain de l’innovation, seul le CEO est en mesure de fixer le cap . « Il est la seule personne habilitée à trancher. Pour la simple et bonne raison que l’innovation ne se délègue pas. » Zoom sur six freins à l’innovation.

1. La peur du chaos

Le grand saut vers l’inconnu en matière d’innovation a, de facto, quelque chose de chaotique. Le changement rapide dans la manière d’adopter de nouveaux process et de nouvelles habitudes de travail peut s’avérer quelque peu déroutant.

Même avec une bonne explication et un véritable exercice de pédagogie, certaines décisions prises peuvent être non comprises, voire aléatoires. Si le progrès émerge de ce chaos, il n’est pas toujours aisé à appréhender pour ceux qui sont en dehors du processus.

2. La peur de la disruption

Chaque entreprise abrite, en son sein, ce que Vijay Govindarajan et Chris Trimble – deux professeurs de l’université américaine de Dartmouth, auteurs de l’ouvrage « The Other Side of Innovation » et théoriciens de l’innovation inversée – appellent un « moteur de performance ». Il s’agit, en l’occurrence, de l’ensemble des fonctions, processus et ressources qui ont été optimisés au fil du temps pour maximiser le succès et la rentabilité de l’activité principale.

Ces fonctions clés comprennent les ventes, le marketing, le droit de la propriété intellectuelle, les achats, l’informatique et la responsabilité. Les personnes qui travaillent au sein de ces divers départements ont des objectifs et des attentes prédéfinies. Mais une équipe d’innovation – en particulier une équipe axée sur l’innovation de rupture – peut venir perturber cette mécanique finement réglée.

3. La peur de perdre le contrôle

Les grandes entreprises déploient des stratégies, qu’elles soient explicitement énoncées ou implicitement mises en oeuvre. Toute nouvelle entité, intégrée à l’entreprise, doit s’aligner sur ces stratégies. Or, pour diverses raisons, cette promesse n’est presque jamais tenue.

Si la valeur ajoutée de la nouvelle entité n’est pas clairement intégrée – et comprise – par les décideurs eux-mêmes au sein d’un objectif stratégique commun, alors l’intégration de cette dernière ne se fera pas sans heurts. A fortiori si cette nouvelle « strate » de l’entreprise est perçue comme détournant les ressources de la stratégie d’entreprise initiale plutôt que de la faire avancer.

4. La peur de la cannibalisation

Un modèle commercial est une conjonction de ressources, d’actifs et de processus conçus pour fournir de manière rentable une proposition de valeur à ses clients. Un bon modèle commercial crée une différenciation sur le marché et a un effet de levier.

Au fil du temps, le modèle économique dominant d’une entreprise, comme son moteur de performance, est optimisé. Or l’introduction d’un nouveau modèle d’entreprise est à la fois coûteuse et risquée. Cela signifie, ni plus ni moins, revenir à la case départ.

La préoccupation majeure est de savoir si le « nouveau modèle » cannibalisera l’ancien, entraînant une perte nette pour l’entreprise.

5. La peur de la dispersion des ressources

Au sein d’une entreprise de « petite taille », toutes les personnes impliquées n’ont aucun problème à outrepasser leurs fonctions pour le bien de celle-ci. Les ressources sont mendiées, empruntées, volées et cajolées.

Mais la croissance a tendance à bouleverser les choses et les équilibres établis. Elle met en lumière, auprès du plus grand nombre, les défis à relever. La mise à l’échelle de l’entreprise doit être effectuée avec le plus grand soin. Afin de ne pas laisser les ressources sur le bord de la route, sans attribution précise.

6. La peur de l’erreur de jugement

Lorsqu’une start-up s’avère suffisamment attrayante sur le marché, elle va forcément attiser la convoitise de grandes entreprises . Mais au moment « du choix de la cible », ces dernières vont davantage adopter une posture défensive, prudente et court-termiste plutôt que de miser sur une potentielle acquisition « plus risquée » mais davantage susceptible d’apporter une véritable plus-value à long terme.

Les dirigeants doivent faire évoluer cet état d’esprit « timoré » et avoir suffisamment foi en leur jugement pour surmonter cette « peur de l’erreur ». Et parier pour gagner.

Par Samir Hamladji

 

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