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Du goût de l’effort au goût du confort

Du goût de l'effort au goût du confort

Les Français ne sont pas devenus paresseux mais ils formulent des attentes dans leur vie professionnelle. Pour Pascal Perri, quelques malentendus doivent néanmoins être levés si nous voulons maintenir notre modèle de protection sociale financé par le travail.

Interrogés un par un, les Français déclarent très majoritairement qu’ils sont satisfaits de leur travail. Une étude récente de l’Institut Montaigne avec l’aide du cabinet Kearney France et Kantar public évalue à 77 % la part de ces Français. De quoi relativiser le bruit de fond de la société qui traduirait une forme d’allergie au travail.

Dans le détail, les indépendants sont plus à l’aise que les salariés du public et du privé. Ils ont repris le contrôle de leur vie. Cette étude invalide par ailleurs le discours à la mode sur les « démissions silencieuses » pour les ramener à leur juste proportion, c’est-à-dire à la marge. Les Français ne sont pas devenus paresseux mais ils formulent des attentes dans leur vie professionnelle : perspectives de carrière et reconnaissance de leur contribution personnelle au succès de leur entreprise. Quelques malentendus doivent toutefois être levés si nous voulons maintenir notre modèle de protection sociale financé par le travail.

L’entreprise n’est pas une démocratie

En premier lieu, l’entreprise est un monde de contraintes, qu’elle soit publique ou privée ou qu’il s’agisse d’une administration. Le contrat de travail repose sur la subordination du salarié. Certaines libertés de la société restent à la porte de l’entreprise. C’est le premier malentendu. L’entreprise n’est pas une démocratie. Le patron n’est pas propriétaire des salariés mais de leur temps de travail, qu’il rémunère. On comprend l’aspiration à plus de participation aux décisions et la quête de sens mais une entreprise est un espace codifié qui poursuit un objectif : assurer sa production et créer des richesses.

Deuxième point, si le travail n’est pas une valeur, comme l’écrit la philosophe Julia de Funès dans « Les Echos », il a de la valeur. Le goût du confort (social) marche en couple avec le goût de l’effort. Le travail n’est pas une fin en soi mais il est un moyen de financement de notre protection sociale. Or, comme celle-ci est destinée à se renforcer, sous les effets du vieillissement de la population, la question n’est pas de se partager la quantité de travail qui existe, comme si l’économie était un jeu à somme nulle, mais au contraire d’accroître la taille du marché pour accroître notre richesse sociale.

Le danger de l’avachissement

Troisièmement, les Français ne sont pas tous égaux face au travail mais tous bénéficient des assurances qui s’y rattachent. Un bon tiers des Français travaille beaucoup et contribue puissamment au financement de l’Etat, un tiers exerce son activité sans zèle et parfois sans passion et un tiers peu ou mal formé se trouve dans le halo qui séjourne aux frontières de l’emploi précaire et du non-emploi.

Il faut s’attaquer au statut de ce dernier tiers qui bénéficie de l’assistance sociale française et lui assurer une formation de nature à favoriser son employabilité. Les inégalités ne sont pas toutes là où la gauche Nupes les perçoit, elles sont au quotidien dans la dépense d’énergie très variable des Français en vue d’abonder la « caisse de communauté ».

Enfin, si le courage manque parfois face à la tâche qui nous attend, c’est que le monde moderne produit le danger sournois de l’avachissement. La société Netflix-Deliveroo a élu le canapé comme le centre du monde pour ses pratiquants les plus assidus. La surreprésentation de divertissements passifs au détriment des loisirs actifs telle que la décrit Olivier Babeau dans son dernier essai endort l’esprit combatif. Les Français ne doivent pas perdre le goût de l’effort. C’est notre seule matière première inépuisable.

Par Pascal Perri

 

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