Le directeur des ressources humaines, dont l’image a longtemps été celle d’un expert en relations sociales, a conquis sa place au comex. A présent, le mot d’ordre est : « Tous au conseil d’administration ! »
Cela fait quinze ans que je milite pour faire coopter les directeurs des ressources humaines (DRH) dans les conseils d’administration , et particulièrement au sein des comités des nominations et des rémunérations, où ils/elles ont évidemment leur place. Ce qui semble une évidence, a été un chemin laborieux. Et c’est la loi Copé-Zimmermann du 27 janvier 2011 qui a servi de facilitateur pour les femmes.
Accompagner la transformation
On oublie trop rapidement que la première bataille remportée par les DRH a été celle de siéger au comité exécutif des entreprises . Trop longtemps, le DRH a eu l’image d’un spécialiste des relations sociales : moins le PDG le voyait, mieux il se portait. Aujourd’hui, les DRH sont un incontournable accompagnant de la stratégie et de la transformation de l’entreprise. Le bras droit ou le bras gauche du PDG, avec le directeur financier. Seulement, il ne suffit pas de le dire, il faut le prouver.
Si on décortique ce que fait une direction des ressources humaines, on comprend tout ce que le ou la DRH peut apporter non seulement en tant qu’exécutif, mais également au sein d’un conseil d’administration (voir encadré). Ce ne sont que des sujets qui impactent de manière fondamentale la fabrique de l’entreprise. Et que peut-on faire de solide dans une entreprise sans toucher à l’humain ?
Sujet stratégique et humain
Aujourd’hui, les DRH sont tous présents au comité exécutif – malgré quelques poches de résistance dans les ETI. Et maintenant, le mot d’ordre est : « Tous au conseil d’administration ! » Car dès que l’on évoque un sujet stratégique, on parle humain.
Au comité des nominations et des rémunérations, la présence d’un DRH est tout aussi indispensable que celle d’un directeur financier au comité d’audit. Le comité des nominations parle plan de succession pour les membres de la direction, au premier rang desquels, le DG ou PDG, et se penche sur la gestion du vivier de talents. S’assurer que l’on a les talents nécessaires pour atteindre ses objectifs et se démarquer de la concurrence n’est pas une mince affaire.
Le comité des rémunérations travaille, comme son nom l’indique, sur la rémunération des dirigeants. Mais c’est encore, en termes d’expertise, le maillon faible, voire très faible des conseils d’administration. Le DRH doit être un expert de la matière pour accompagner les discussions avec les consultants spécialisés et faire oublier le reproche qui lui est souvent fait de ne pas savoir compter.
Posture de dirigeant
Depuis 2016, la statistique s’emballe et les sociétés du CAC 40 ont recruté 15 femmes DRH au sein de leur conseil d’administration, mais aucun homme. Est-ce en raison de la loi Copé-Zimmermann ou bien les femmes font-elles des RH différemment ? Par exemple, de manière plus transversale, ou en mode projet ? Peut-être en se positionnant davantage comme conseil du PDG et en business partner ? D’une façon plus dynamique et énergique, avec une parole plus libérée et sans complexe ni timidité vis-à-vis du PDG ? Il faut se poser la question lorsque l’on constate l’absence de DRH masculins dans les boards.
Il faut également s’interroger sur la « posture du dirigeant » – ce qui ramène au titre de cette chronique : « De l’art de passer d’expert à pair ». Faire comprendre son rôle et ses missions, c’est bien, mais le DRH doit aussi renforcer sa posture de dirigeant. Autrement dit, pour schématiser, se demander comment être l’un des leurs au board, comment n’être ni trop opérationnel, ni trop politique, ni trop expert, mais solide techniquement. Comment se poser en business partner, qui ne s’excuse pas d’être DRH, qui se constitue un réseau solide et diversifié, qui apprend à se mettre en valeur, voire à se mettre en scène . En bref, comment faire en sorte que la direction des ressources humaines s’incarne ?
A l’heure où l’on va juger la performance d’une entreprise au-delà de ses résultats financiers, à l’heure où les organisations recherchent cohésion sociale, bien-être au travail, et fierté d’appartenir, comment ne pas mettre les DRH au centre ?
Brigitte Lemercier est la fondatrice de NB Lemercier & Associés, cabinet spécialisé dans le conseil en gouvernance et en recrutement et développement de hauts dirigeants.
Les missions d’une direction RH
# Adaptation du capital humain à l’organisation // # Recrutement, développement et conservation des talents // # Préparation des plans de succession // # Gestion des rémunérations // # Réflexions sur les futurs métiers, sur l’impact des nouvelles technologies, sur l’organisation, les métiers, les attentes des collaborateurs, la flexibilisation des organisations et du temps de travail ainsi que la raison d’être de l’entreprise // # Partie prenante à la communication interne et externe, à la RSE, à l’élaboration du code éthique et à l’évaluation des risques.
Complètement d’accord avec vous Brigitte. L’humain est à remettre au centre des discussions d’un conseil d’administration. Mais il faut aussi préparer les DRH à des discussions financières, un sujet sur lequel ils et elles ont encore trop souvent besoin de monter en compétence ou tout simplement en confiance pour prendre la parole.