Formation professionnelle

Compte personnel de formation : le gouvernement fait un geste significatif

La ministre du Travail, Muriel Pénicaud, présentera une ordonnance « balai » amendant la loi du 5 septembre 2018 lors du premier Conseil des ministres de la rentrée la semaine prochaine. Un point intéressera des millions de Français : la possibilité de conserver une partie des droits du compte personnel de formation au-delà du 31 décembre 2020. La mesure porte sur plusieurs centaines de millions d’euros, voire davantage.

Près d’un an après la publication de la loi « Pour la liberté de choisir son avenir professionnel » réformant la formation, la ministre du Travail, Muriel Pénicaud, présentera deux ordonnances correctives lors du Conseil des ministres de la rentrée du 21 août qui, bien que d’apparence technique, intéresseront des millions de Français. La première adaptera la loi à la réalité de l’outre-mer. Les formations de niveau BTS seront par exemple éligibles aux aides à l’apprentissage. Le second texte, de portée nationale, comprendra trois points très sensibles, selon nos informations.

Le droit des conjoints d’artisans à être maître d’apprentissage va être rétabli, sa disparition ayant provoqué pas mal d’émoi dans les rangs des bouchers, coiffeurs ou autres professionnels. L’utilisation de « Pro A », un dispositif nouveau taillé pour les salariés en reconversion lourde mais déjà détourné de sa cible par les entreprises, va être mieux encadré : il sera soumis désormais à un accord de branche étendu par le ministère. Enfin, les règles d’utilisation du compte personnel de formation (CPF) vont être assouplies. Une mesure qui porte sur des centaines de millions d’euros, et peut-être même beaucoup plus.

Date butoir

Mis en oeuvre en 2015, le CPF est un droit bénéficiant à tous les salariés ou les demandeurs d’emploi tout au long de leur carrière professionnelle. A ce jour, on en compte 33 millions qui sont alimentés, dont un peu plus de 2 millions ont été utilisés par leurs titulaires. Estimant la montée en charge du dispositif insuffisante, le gouvernement a opté pour un changement majeur :  depuis le 1er janvier, le CPF n’est plus alimenté en heures mais en espèces sonnantes et trébuchantes , à raison de 500 euros par an, plafonné à 5.000 euros (800 et 8.000 respectivement pour les personnes peu qualifiés ou handicapés).

Toutes les heures acquises précédemment ont été converties à raison de 15 euros l’heure. A ceci près qu’une partie du stock qui n’avait pas été utilisé par leurs titulaires – les heures issues du DIF, l’ancêtre né en 2004 du CPF –  devaient disparaître au 1er janvier 2021 . Sans que personne, ou presque, ne le sache. Le ministère avait deux options. La première : conserver la date limite, au risque de mécontenter tous ceux dont le CPF serait amputé du jour au lendemain. Pour celui qui n’y avait jamais fait appel, cela représente 1.800 euros (120 heures, plafond du DIF multiplié par 15 euros).

Pas de limite de durée

Autre option, faire sauter l’échéance, quitte à reporter dans le temps un volant de droits potentiellement très important. Le DIF n’ayant pas fait l’objet d’un suivi centralisé, il est impossible de savoir exactement combien. Faute de mieux, on ne peut que faire des estimations qui ne sont pas démenties. Si 2 millions de personnes disposent encore de 20 heures de DIF chacune, cela représente 600 millions d’euros. Pour 5 millions et 30 heures, la facture grimpe à 2,25 milliards…

La loi du 5 septembre avait retenu la première option. De peur de faire sauter la banque ? Depuis, plusieurs DRH et certains syndicats sont revenus à la charge. L’ordonnance qui sera présentée le 21 août conserve la date du 31 décembre 2020 comme date butoir pour saisir son reliquat d’heures de DIF (avec contrôle de preuve par la CDC à la clef). Mais une fois la conversion faite, les euros correspondants pourront être utilisés sans limite de durée.

Alain Ruello

 

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