Portrait – La créativité et l’intelligence collective vont être vitales dans la résolution des grands défis. Mais il va aussi falloir trouver la méthode pour mobiliser les nouvelles technologies et la puissance de l’intelligence artificielle pour les mettre aux services du bien commun.
La crise sanitaire nous a rappelé à quel point nous n’avons pas d’autres choix que d’apporter des réponses urgentes aux défis de demain, de plus en plus palpables.
Pour être à la hauteur de l’immensité de la tâche – atteindre d’ici à 2030 les objectifs de développement durable définis par l’ONU, parmi lesquels la santé et le changement climatique -, nous allons avoir besoin d’un effort collectif considérable. Chacun, à titre individuel et au sein de son organisation, pourra se poser la question de sa propre contribution aux *ODD.
Mais cette indispensable prise de consciente ne sera pas suffisante ; elle doit de plusieurs questionnements, à commencer par celui des leviers à activer collectivement pour trouver des solutions innovantes face à l’urgence des défis à relever, comme celui du changement climatique. La créativité et l’intelligence collective vont être vitales dans leur résolution. Mais il va aussi falloir trouver la méthode pour mobiliser les nouvelles technologies et la puissance de l’intelligence artificielle pour les mettre aux services du bien commun.
Des laboratoires universitaires, comme ceux du MIT, travaillent sur des outils digitaux basés sur les dernières avancées technologiques et scientifiques permettant de simuler l’impact des différentes actions engagées sur la courbe du climat, à l’échelle mondiale.
Ces plateformes intelligentes et prédictives créent des scenarii en activant des grands paramètres tels que :
- la part des énergies renouvelables,
- la variation du prix carbone,
- la reforestation,
- ou encore le déploiement de technologies visant à retirer du CO2 de l’atmosphère, pour contenir le réchauffement climatique à 1,5 °C.
Créer les bonnes combinaisons de leviers
Par exemple, lorsque l’on teste des scenarii en activant au maximum le paramètre « reforestation », on constate une diminution de la température de 0,1 à 0,2 °C, à l’échelle globale, en 2100. On se rend compte qu’il est très difficile, voire impossible, de rester sous le seuil des 1,5° à 2 °C supplémentaires, en faisant bouger un seul paramètre ou en trouvant une seule solution _ même si elle est déployée à grande échelle.
Par exemple, en prenant le seul paramètre « Innovations technologiques disruptives », l’objectif ne pourrait être atteint dans les temps impartis, même en ne sélectionnant que les inventions les plus prometteuses, estiment les experts. Néanmoins, il est rassurant de constater que plusieurs scenarii positifs sont possibles dans ces modélisations en créant les bonnes combinaisons de leviers à activer localement. Encore faut-il mobiliser des capacités de créativité et d’intelligence collective porteuses d’imagination, pour les faire émerger.
C’est aussi en associant au pouvoir de l’imagination, la puissance de l’intelligence artificielle que nous pourrons contribuer à trouver des nouveaux cas d’usage pour atteindre les ODD. Un rapport du McKinsey Global Institute recense aujourd’hui plus de 160 cas d’usage d’IA, avec des technologies tels que :
- le traitement automatique du langage naturel (Natural Language Processing – NLP),
- la vision artificielle (computer vision)
- ou l’apprentissage profond (deep learning)
permettant de grandes avancées dans les domaines sociaux et environnementaux.
Indicateurs partagés
Les entreprises leaders dans l’IA ont commencé à lancer des offres sur ces sujets :
- Microsoft avec AI for good,
- IBM avec Smarter Planet,
- et Accenture avec Citizen AI.
Elles travaillent sur ces nouveaux cas d’usage pour anticiper les évolutions des demandes des marchés de demain.
D’autres acteurs se lancent dans la course poursuite de la « Tech for good », par exemple pour permettre la réduction des flux et encourager le co-voiturage dans des villes durables, reconnaître différentes formes de maladies ou encore pour préserver des espèces en voie de disparition. Deepmind, qui avait été racheté par Google début 2014 , travaille même à développer des solutions d’intelligence artificielle pour la réduction de consommation d’énergie pour les data centers.
Cette combinaison émergente de la créativité et des nouvelles technologies telles que l’IA constitue un pilier fondamental pour créer des scenarii positifs face au changement climatique et pour trouver des cas d’usage innovants pour répondre aux ODD. Cela ne sera cependant possible qu’avec des politiques publiques solides soutenant les efforts des villes, des entreprises et des organisations, et en étant transparents sur la réalité des enjeux locaux avec des indicateurs partagés.
RODOLPHE DURAND ET INES GAÏSSET
*ODD : Les Objectifs de développement durable