En période de crise, quand le développement de l’activité devient difficile pour les entreprises, les gestionnaires se tournent vers des actions de réduction des coûts. La tentation est parfois forte d’utiliser les ressources humaines comme première variable d’ajustement. Or, il se trouve que l’un des plus grands leviers de gain se trouve dans l’amélioration de la performance grâce au bien-être des collaborateurs et non dans la réduction des effectifs.
Investir sur le bien-être au travail est rentable
S’il y a encore des doutes sur le fait que le bien-être des salariés est un facteur de performance, nous savons par des études statistiques que les entreprises menant une politique active pour le bien-être de leurs collaborateurs (notamment sur l’autonomie et la reconnaissance) réalisent des bénéfices jusqu’à deux fois et demi supérieurs à celles qui ne font rien. De plus, ce bon climat social serait communicatif aux clients dont le niveau de satisfaction serait plus élevé qu’ailleurs.
L’enjeu est donc d’augmenter la profitabilité grâce, d’une part, à une plus grande motivation des salariés, à plus de créativité et de productivité, à un sentiment d’appartenance plus fort, à un sens plus prononcé du service au client et, d’autre part, de réduire les coûts liés à l’Absentéisme, à la non qualité, à un turnover trop important…
Bien-être et performance
Nombre d’études sur le stress au travail, et plus largement sur les risques psychosociaux, s’accordent sur l’importance de la part individuelle (correspondant au degré de stressabilité de l’individu) et des conditions de travail c’est à dire l’aptitude de l’entreprise à engendrer un environnement de travail stressant (concernant l’autonomie, le soutien du collectif et de l’organisation).
Pour ce qui concerne la part individuelle, le sentiment de bien-être est en grande partie lié à la satisfaction des besoins psychologiques fondamentaux liés au travail :
- autonomie,
- compétences,
- liens avec les personnes importantes pour soi.
S’il paraît de plus en plus évident que le bien-être des salariés peut avoir un effet positif sur leur performance, nous pouvons nous demander s’il existe un effet retour de la performance individuelle et globale sur le bien-être des collaborateurs. Cela nous amène à nous poser la question suivante : est-ce que la performance individuelle et collective suffisent à combler les besoins psychologiques essentiels d’autonomie, de compétences et de relations interpersonnelles ?
Performance et qualité du travail
Pour répondre à cette question, il faut s’intéresser à la notion de performance et à sa mesure. Nous pouvons définir la performance individuelle au travail comme « un ensemble de comportements et de compétences / capacités valorisés par l’entreprise et attendus des employés, et qui influencent positivement la réalisation d’objectifs ».
La perception de la performance individuelle dépend donc de l’évaluation de la contribution des collaborateurs à ses objectifs. Deux questions majeures se posent :
- Comment la performance est-elle évaluée ?
- Les objectifs sont-ils définis, communiqués et connus des collaborateurs ?
Cela suppose, et nous rejoignons là un thème cher à Yves Clot et Philippe Davezies, d’instaurer dans l’entreprise un débat sur la qualité du travail à tous les niveaux.
En effet, la source majeure de stress au travail est la « qualité empêchée ». Le travail réel est toujours plus complexe et plus long que le travail prescrit qui est théorique et macroscopique. D’autre part, la mise sous tension d’un salarié ne l’amène pas à faire le même travail plus vite.
Concrètement, l’engagement du dialogue dans l’entreprise consiste pour chaque fonction à répondre à la question : qu’est-ce que le travail bien fait ?
Par expérience, la réponse ne fait malheureusement pas souvent référence à des notions qualitatives, mais plutôt quantitatives. De plus, dans la plupart des cas, la notion de qualité du travail n’est pas discutée entre les salariés et leur responsable.
Qualité du travail et organisation
Comment faire ?
Une solution est de créer une équipe projet pluridisciplinaire intégrant toutes les parties prenantes, et, au besoin, un consultant extérieur, pour réaliser un audit des Risques psychosociaux.
Sur la base des résultats de cette étude, l’entreprise conçoit, en cohérence avec les notions de qualité du travail identifiées, un système de reconnaissance et de valorisation du travail, notamment par l’autonomie et la participation aux décisions.
Enfin, il faut y adjoindre les modes de management correspondants : former les managers à ce type de management et à la prévention des Risques psychosociaux, et instaurer un système d’évaluation des managers et salariés centré sur la reconnaissance, l’autonomie et qui met en exergue ce qu’est le travail bien fait.
Il existe un pré-requis au lancement d’un tel chantier : ne pas tomber dans le jugement et la stigmatisation, dédramatiser et faire preuve de bons sens. Toute la complexité est d’amener employeurs et salariés à entrer dans le cercle vertueux « bien-être / performance » pour retrouver le goût du travail, l’envie d’avancer ensemble à la faveur d’une ambiance motivante pour chacun.