L’envie d’ailleurs tente trois cadres sur dix, souvent par insatisfaction professionnelle, selon une étude de l’Apec. Mais la prudence reste de mise : dans quatre cas sur cinq, le projet est proche de l’activité actuelle.
Envie d’ailleurs, mais pas forcément de se lancer dans l’inconnu… S’il y a un désir important de changement professionnel chez les cadres, le passage à l’acte n’a rien d’évident, montre une étude que vient de publier l’Association pour l’emploi des cadres (Apec). 31 % d’entre eux déclarent caresser un projet de reconversion, mais 8 % seulement ont entamé des démarches, selon cette enquête réalisée en juin auprès d’un échantillon représentatif. Cette intention est logiquement plus répandue chez les chômeurs (60 %), mais aussi chez les moins de 35 ans (45 %).
Mauvaise nouvelle pour les entreprises, elles qui se plaignent de difficultés de recrutement , dans un contexte porteur pour l’encadrement , si des éléments de la vie personnelle peuvent parfois provoquer un déclic, le point de départ de cette envie de changement est « plus généralement une situation d’insatisfaction au travail », souligne l’Apec.
Le Top 5 des raisons invoquées le confirme : 37 % des personnes interrogées qui pensent à se reconvertir évoquent « la volonté de faire un métier qui a plus de sens (pour [eux] ou pour la société) », 35 % cherchent de meilleures conditions de travail, 34 % invoquent de « l’ennui ou de la lassitude ».
Changement de secteur d’activité ou de région
Les cadres gardent cependant les pieds sur terre. Pas question d’aller bâtir des châteaux en Espagne. « L’attrait pour un nouveau métier, un métier différent » n’est invoqué que par 30 % des personnes enquêtées, à peine plus que « le souhait de meilleures perspectives de carrière et de rémunération », cité par un cadre sur quatre.
Les projets de ceux qui rêvent d’ailleurs sont « rarement radicaux », constate l’Apec : « Dans plus de 6 cas sur 10, le choix du cadre est de s’orienter vers un métier proche de son métier actuel », contre 15 % des cas où le métier est radicalement différent. Ce qui prédomine, ce sont plutôt des envies de changement de secteur d’activité (82 % des cadres souhaitant se reconvertir) ou de région (54 %) ou encore une installation à son compte (56 %).
La prudence des cadres s’explique avant tout par la conscience qu’une reconversion est un « cheminement difficile », souligne l’Apec. Cette crainte est encore plus vraie pour ceux qui ne se sont pas encore lancés dans des démarches pour concrétiser leur projet.
Ce n’est pas tant la nécessité d’acquérir de nouvelles compétences qui les inquiète. Ils savent qu’ils auront besoin d’une formation qui pourra aller jusqu’à un an. Ils ont aussi conscience qu’il leur faudra faire des sacrifices : les deux tiers sont prêts à renoncer à des fonctions managériales ou à un poste à responsabilité et un sur deux est prêt à renoncer au statut cadre, ce qui devrait donner à réfléchir aux employeurs. Deux sur cinq se disent prêts à une baisse de rémunération ou des horaires de travail plus importants.
Nécessaire accompagnement spécifique
Mais les freins identifiés sont nombreux, à commencer par la peur de se tromper, de prendre trop de risques invoquée par un tiers des candidats à la reconversion. Le sentiment de ne pas avoir les moyens d’assumer son choix financièrement vient ensuite (28 %), à égalité avec la crainte d’une moins bonne rémunération ou de moindres perspectives de carrière.
Les projets de reconversion quels qu’ils soient nécessitent un accompagnement spécifique, avertit l’Apec qui souligne que « chaque projet est unique avec une variabilité de sa durée », « rarement linéaire et qui peut durer plusieurs mois voire plusieurs années ». Or plus d’un cadre projetant de se convertir sur deux « pensent qu’il leur sera difficile de convaincre les différents interlocuteurs qu’ils auront à rencontrer que ce soit pour obtenir un poste ou dans le cadre d’une création d’entreprise ».
Par Leïla de Comarmond