Désormais l’ensemble du territoire national est couvert par des groupements à fiscalité propre. À la suite des lois MAPTAM et NOTRé, certaines communautés, notamment de communes et d’agglomération, ont par ailleurs fusionné pour atteindre une taille critique.
Comme c’est le cas depuis la loi Chevènement de 1999, chaque année, ces établissements publics de coopération intercommunale se voient transférer de plus en plus de compétences, de services et de moyens matériels ou d’agents pour les exercer. Dans le même temps et au regard du contexte financier tendu auquel sont confrontées toutes les collectivités, se développent de plus en plus des mécanismes de mutualisation entre les communes membres et leur groupement.
Comprendre la complexité liée au développement de l’intercommunalité
Face à cette complexité croissante, il est essentiel que les cadres territoriaux, appartenant aux services communaux, aux services communautaires ou métropolitains comprennent bien les nouveaux enjeux de la gestion du groupe communal (communes et EPCI) et appréhendent parfaitement les différentes interactions entre les structures publiques locales concernées. Cette compréhension concerne en tout premier lieu les questions budgétaires et financières. En la matière, il est impératif que tous les acteurs locaux, et en premier lieu les décideurs comprennent que le destin des communes et leurs groupements sont irrémédiablement et indissociablement liés. Il s’agit d’une véritable révolution culturelle qui conduit inévitablement à remettre en cause à plus ou moins brève échéance :
- Les stratégies de développement du territoire,
- Les stratégies financières des communes et du groupement, mais également, au delà, les méthodes d’élaboration de ces stratégies,
- Les relations avec les autres institutions,
- L’équilibre des pouvoirs administratifs et politiques sur le territoire concerné,
Comprendre les enjeux des pactes financiers et fiscaux
Pour que le territoire ne soit pas victime de conflits éventuels entre la structure intercommunale et les communes membres ou même d’une coopération inefficiente, il est impératif que le groupe communal, en toute transparence, élabore un pacte financier et fiscal communautaire équitable sur la base de prospectives financières. Ces outils doivent permettre en amont de se mettre d’accord sur les projets et investissements à réaliser pour développer le territoire, sur la répartition des responsabilités entre les communes et le groupement mais également sur la juste répartition des ressources nécessaires pour les financer. La réflexion sur la répartition des ressources doit bien évidemment concerner les ressources fiscales mais aussi les dotations de l’Etat et intégrer les phénomènes liés aux fonds de péréquation. Cette réflexion doit intégrer tous les outils et mécanismes financiers, tous les leviers que la réglementation autorise, de l’attribution de compensation en passant par la dotation de solidarité communautaire sans oublier les fonds de concours.
Au-delà de l’appréhension et de la compréhension des mécanismes, les cadres territoriaux doivent aussi connaitre les outils pour piloter leur activité et faire en sorte que tout euro dépensé soit un euro utile.
Mettre en œuvre des outils de pilotage pour optimiser la gestion de son service
Dans un contexte de ressources contraintes, pour la plupart en stagnation et pour certaine en diminution, la maîtrise des dépenses locales s’impose. Deux voies principales existent pour maîtriser les dépenses : développer des logiques de contrôle en agissant sur les procédures, en fixant des normes d’évolution à ne pas dépasser. Il peut également s’agir de piloter mieux son activité en actionnant des leviers de productivité et en priorisant les actions et politiques publiques conduites.
La démarche d’optimisation et de rationalisation des dépenses peut être progressive. Dans un premier temps, il s’agit de rationaliser les dépenses de fonctionnement sans rien modifier dans l’organisation des services de la collectivité. Il s’agit dans le cadre de ce premier niveau d’optimisation de supprimer les dépenses inutiles, de réduire l’absentéisme du personnel, de passer d’une logique de marchés publics à une logique d’achat public. Pour ce faire, il convient de s’intéresser à la façon dont les prestataires construisent leurs grilles tarifaires pour essayer d’obtenir le juste prix pour le niveau de prestation requis : celui qui répond strictement (et pas plus) aux besoins de la collectivité et aux attentes des citoyens. Il s’agit également d’avoir une bonne gestion du patrimoine permettant notamment de diminuer les coûts d’assurance, d’entretien/maintenance ou des impôts à acquitter.
Dans un second temps, les services de la collectivité peuvent réfléchir à la modification de l’organisation existante sans pour autant changer le niveau des prestations rendues à l’usager. Dans ce cadre, il est possible de modifier les habitudes, de s’interroger sur la mise en œuvre de moyens matériels susceptibles de générer des gains de productivité. La dématérialisation, l’utilisation d’outils informatiques et des technologies nomades permet de réduire les temps improductifs et les lourdeurs administratives. Dans le cadre de ces analyses, il convient de s’interroger sur les éventuels phénomènes de sur qualité générés par certaines organisations ou certaines habitudes de travail. Dans ce domaine, il est également nécessaire de se poser la question des modes de gestion des services publics : en régie avec les agents de la collectivité, en régie via un prestataire de service choisi dans le cadre du code des marchés publics, en déléguant la compétence à une structure intercommunale, en mutualisant les moyens avec un EPCI, en confiant le service à une SEM ou à une SPL ou en déléguant la gestion du service public à un concessionnaire. En effet, l’externalisation peut parfois permettre d’optimiser la gestion en réduisant les couts sans toucher au niveau de service.
Si les logiques de contrôle peuvent permettre de dégager des économies dans un premier temps, très vite elles atteignent leurs limites. Si les collectivités souhaitent continuer à générer des économies sur leur fonctionnement courant, elles doivent mettre en œuvre des outils relevant d’une logique de pilotage.
Dans le cadre de ces démarches de pilotage, il s’agit en particulier de s’interroger sur le niveau de service public rendu à la population et/ou sur le portefeuille des politiques publiques proposées par la collectivité. En effet, pour une politique donnée ou pour une prestation spécifique, la collectivité peut proposer un service plus ou moins complet. Dans le cadre d’une gestion optimisée de ses dépenses de fonctionnement, elle doit s’interroger sur le niveau de la prestation offerte. De la même manière, les politiques publiques ont tendance à venir s’ajouter les unes aux autres jusqu’à former un mille-feuille. Ainsi, pour générer des économies de fonctionnement, il est souvent très instructif et efficace de s’interroger sur le portefeuille des politiques publiques, sur les bénéficiaires, sur les coûts induits et sur leurs impacts socio-économiques. Il s’agit également de s’interroger sur les effets consécutifs à une éventuelle suppression de la politique considérée.
Laurent Guyon, DAF du SDIS de la Haute-Garonne.