Créé il y a quatre ans, le groupe Fnac Darty est bien plus que la simple union de deux marques françaises emblématiques. C’est un pari audacieux pour, notamment, refonder leurs modèles d’affaires, réaliser d’importantes synergies tout en préservant et adaptant, autant que possible, les équipes en place et le modèle social. Une tâche d’ampleur confiée à Frédérique Giavarini en tant que DRH.
Consultante pendant près de 10 ans, celle, que l’on pressent comme optimiste et curieuse des autres, est entrée à la Fnac en 2007, attirée par le rayonnement de la marque. D’abord chargée de mission à la direction de la stratégie, elle dirigera par la suite successivement les équipes marketing, stratégie, organisation et affaires publiques. Nommée DRH en 2014, elle en gardera le poste dès la création du nouveau groupe en juillet 2016. Frédérique Giavarini est désormais Secrétaire Générale. Toujours en charge des ressources humaines, elle pilote aussi la RSE et la gouvernance. De quoi vivre et accompagner le changement, après avoir connu l’ouragan de la fusion.
Quatre ans après la naissance du groupe, quels changements ont été les plus délicats à accompagner ?
Frédérique Giavarini : En créant ce groupe, nous savions tous que la dimension humaine serait déterminante. La Fnac et Darty sont comparables en âge et en taille. Les deux enseignes ont la chance d’avoir chacune une communauté de salariés très engagée. Mais à côté de cela, des différences importantes existaient, en matière de culture d’entreprise, d’organisation ou de pratiques RH notamment. Sur le plan des ressources humaines, le plus délicat a été de combiner la mise en œuvre d’actions immédiatement indispensables avec d’autres, qui réclamaient légitimement un temps bien plus long. D’un côté, nous avions des synergies à réaliser, une organisation nouvelle à mettre en place, au siège surtout. De l’autre, le défi portait sur la culture d’entreprise et les pratiques sociales.
L’un a-t-il facilité l’autre ?
La réalisation des synergies annoncées au marché a été facilitée par le fait que nous avions 50 % de chiffre d’affaires sur des familles de produits communes et qu’il s’agissait avant tout de synergies d’achat. Nous les avons réalisées avec un an d’avance, et avons dépassé les objectifs. C’est une source de fierté d’avoir pu le faire ainsi, en préservant autant que possible les équipes. Cela a contribué à créer un climat plutôt favorable aux changements. En revanche, cela n’a en rien changé la nature des défis à relever.
Avec deux enseignes ayant chacune une personnalité aussi forte, comment initier l’émergence d’une culture sociale commune ?
En avançant pas à pas. En faisant primer le dialogue et la pédagogie. Dans un groupe comme le nôtre, composé à 80 % d’employés, où le contact direct avec les clients est la clé de l’activité, la rationalité est aussi économique que sociale. Un tel changement bouleverse les repères, que l’on soit dirigeant, managers, salariés, ou représentants syndicaux… Chacun et tous, nous avons dû construire. Et cela n’a, je crois, été évident pour personne.
Comment cela s’est-il manifesté ?
Par exemple, très tôt, le groupe aurait pu faire le choix de fusionner les institutions représentatives du personnel au niveau du groupe. Mais le climat social est à la fois une valeur, au sens de qualité, et un actif. On ne peut pas dire que l’on veut dialoguer et faire preuve de pédagogie et se comporter soi-même différemment. Cela ne fait donc qu’un an qu’il y a un comité de groupe commun. Le temps a aussi été nécessaire pour organiser une vraie mixité dans les services, au siège, entre les salariés issus des deux enseignes… Nous avons déployé des outils digitaux nous permettant de prendre le pouls et d’écouter nos salariés dans l’ensemble des entités du groupe. L’engagement au travail, ça se cultive tous les jours et avec les bons outils.
En plus de la création du groupe, chacune des enseignes doit affronter une recomposition de son modèle et de ses marchés. Comment avez-vous accompagné les services ?
Les attentes et les pratiques de nos clients ont profondément évolué au cours des dernières années et ont exigé le déploiement de nouveaux services et la digitalisation de nombreux processus. La rapidité des changements nous conduit à anticiper en permanence pour faire évoluer les compétences des collaborateurs et recruter de nouveaux profils. Les deux sont nécessaires, pour créer de la valeur avec le digital, transformer la relation client, déployer des offres reposant sur des abonnements à de nouveaux services… En matière de formation, nous avons capitalisé sur le savoir-faire de Darty et son centre de formation, en créant l’académie Fnac Darty. Mais en plus des compétences, c’est de qualités humaines dont nous avons besoin. Il faut un engagement sans faille des équipes pour porter ces changements. Nous accompagnons donc aussi l’évolution des modes de management, en faisant plus de place à la confiance, en promouvant un pilotage aux objectifs, en apprenant à faire du feed-back. Ces évolutions, structurelles, ont d’ailleurs été accélérées par la crise du Covid-19.
La direction des ressources humaines a-t-elle dû aussi s’adapter ?
Oui, sur plusieurs plans. Avant tout, en développant une connaissance fine des compétences digitales et des nouveaux métiers, mais aussi en accompagnant le déploiement d’une organisation agile pour accélérer nos développements sur internet. La DRH a dû adapter ses processus de recrutement et les parcours collaborateurs. Cela a porté sur notre façon de communiquer nos offres d’emploi, de recevoir les candidats, de les tester, de les intégrer dans l’entreprise, puis de les évaluer au fil de leur carrière.
Plus largement, je pense que les directions des ressources humaines doivent intégrer des compétences en marketing et communication pour mieux porter leurs projets.
L’exploitation et l’analyse des données RH deviennent clés pour travailler par exemple à limiter le turn-over, pour bien connaître et faire évoluer les compétences, pour investir là où le groupe en a le plus besoin ou encore pour corriger les inégalités salariales.
Les tâches à moindre valeur ajoutée doivent quant à elles, être peu à peu industrialisées.
En tant que secrétaire générale, vous pilotez désormais aussi la RSE et la gouvernance du groupe en plus des ressources humaines. Sur quels points est-il selon vous le plus important d’articuler ces trois domaines pour les années à venir ?
Plusieurs font l’objet d’un travail important. Le pilotage des risques et de la compliance, en prenant la peine d’aller chercher, derrière les contraintes, ce qui peut être vertueux et source de création de valeur. En travaillant aussi sur la raison d’être du groupe, qui constitue notre boussole et que devra incarner notre futur plan stratégique. Notre objectif est d’apporter des preuves tangibles du respect de nos engagements et de l’accomplissement de notre mission en faveur d’une consommation plus durable. Une bonne illustration est le baromètre du SAV, que nous avons publié pour la 3 e année consécutive. En classant les marques en fonction de leur durabilité (fiabilité et réparabilité de leurs produits), nous accompagnons nos clients vers un « choix éclairé », en ligne avec l’évolution de leurs modes de consommation. L’engagement de nos salariés est une valeur considérable. Ils sont extrêmement fiers de nos marques. En portant ces sujets, je crois que nous y contribuerons de la meilleure des manières.
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