Via des amendements au projet de loi « avenir professionnel », le gouvernement veut quintupler le nombre de postes de hauts fonctionnaires ouverts aux contractuels.
Développer l’embauche de contractuels : le Premier ministre, Edouard Philippe, en a fait l’un des piliers du « big bang » de la fonction publique qu’il a annoncé en février. Cependant il a promis de jouer la carte de la concertation avec les syndicats.
Le secrétaire d’Etat en charge de la Fonction publique, Olivier Dussopt, a ouvert le 15 mai le dossier avec eux, avec au programme, notamment, « déterminer les secteurs et missions concernés par l’extension du recours au contrat », précise le document d’orientation cadrant les discussions.
Ce ne sera pas tout le monde. Le gouvernement a en effet déposé des amendements au projet de loi « pour la liberté de choisir son avenir professionnel » qui préemptent le sujet pour les postes d’encadrement supérieur dans les trois fonctions publiques.
Il ne s’agit pas d’une révolution au sens où il est déjà prévu la possibilité de recruter des contractuels dans la haute administration. Mais son champ va être très fortement étendu, passant de quelque 2.000 postes à 10.000.
Aller vite
Jusqu’à présent, au sein de l’Etat, seuls étaient concernés les 500 postes à la discrétion du gouvernement. En clair, les directeurs d’administration centrale. Une fois le projet de loi « avenir professionnel » voté, s’ajouteront les postes de chefs de service, de sous-directeur, de directeur d’établissement public ou de services déconcentrés. Soit un total de 2.700 emplois.
Dans la fonction publique territoriale, seront « concernés l’ensemble des emplois fonctionnels de direction des collectivités territoriales et de leurs établissements, soit plus de 7.000 emplois », précise le gouvernement dans l’exposé des motifs de l’amendement la concernant. Contre 1.500 postes aujourd’hui. Dans la fonction publique hospitalière, 650 emplois seront désormais ouverts aux contractuels.
Aussitôt informée, la CFDT a protesté. Dans un communiqué intitulé : « Pourquoi tant de hâte », elle a demandé au gouvernement de reporter l’examen de ces dispositions au projet de loi ciblé sur la fonction publique prévu en 2019. Sans succès.
« Il y a toujours eu la volonté d’aller vite sur le chantier de l’encadrement supérieur, c’était même un engagement d’Emmanuel Macron dans la campagne électorale que d’accroître le vivier des candidats aux emplois de direction », affirme-t-on au secrétariat d’Etat à la Fonction publique.
L’ENA et l’X concernés au premier chef
Dans l’entourage d’Olivier Dussopt, on souligne que « les dispositions concerneront également les fonctionnaires qui ne remplissent pas les conditions statutaires exigées pour les postes et aux contractuels déjà employés dans les administrations ».
Et on ajoute : « Après la publication de la loi, il y aura tout un travail de concertation avec les employeurs et les partenaires sociaux pour définir dans les textes d’application les critères requis pour postuler ».
Outre les enjeux de déontologie, dans la mesure où l’examen par la commission ad hoc n’est pas obligatoire au moment du recrutement, à la CFDT, on craint un changement de modèle.
Les fonctionnaires CFDT soulignent que le quintuplement du nombre de postes sur lesquels sera autorisé le recrutement de contractuels ne pourra être sans incidences sur le système actuel de recrutement des hauts fonctionnaires, et notamment le nombre de recrutements dans les grandes écoles de la fonction publique, à commencer par l’ENA et l’X concernés au premier chef.
Leïla de Comarmond