Cotisations formation collectées par les Urssaf, centralisation par la Caisse des dépôts, remise en cause de certains organismes paritaires… La ministre va frapper fort mardi.
Ca va tanguer ! Cotisations entreprises collectées en partie ou totalement par les Urssaf, centralisation des fonds par la Caisse des dépôts, remise en cause profonde de certains organismes gérés par les syndicats et le patronat, au premier rang desquels les Opca et les Fongecif… A l’image de la révolution copernicienne enclenchée pour l’apprentissage, le gouvernement s’apprête à frapper fort sur la formation professionnelle. Et ce qui se dessine va visiblement dans le sens d’une grosse brèche sur le paritarisme de gestion.
Muriel Pénicaud a donné le pouls jeudi dernier en commentant l’accord , encore soumis à signature (sauf FO qui s’est déjà engagé à le faire), des partenaires sociaux : très bien pour le volet renforcement des droits des salariés, mais zéro pointé sur celui de la tuyauterie.
« Pour que cela marche, il ne faut pas simplement créer le droit. Il faut le rendre effectif. Mais pour cela, il faut que ce soit plus simple […] Il y a énormément d’organismes. De modes de gestion différents, d’enveloppes différentes », a déclaré la ministre du Travail, avant de promettre un « big bang » pour mardi.
En finir avec les disparités
En toile de fond de ce big bang, il y a la volonté du gouvernement de faire en sorte, comme pour l’apprentissage, que chaque euro collecté pour la formation professionnelle aille bien à la formation professionnelle. Et que chaque citoyen, au travers de son compte personnel de formation (CPF), puisse agir de façon responsable : encore faut-il qu’il dispose de la vérité des prix sur les formations, les taux de réussite ou encore sur les débouchés.
Pour cela, le ministère du Travail veut en finir avec les disparités induites par le système qui font que le coût de l’heure d’un CPF peut varier dans un rapport de 1 à 7 pour une même formation, selon le taux de prise en charge par l’Organisme paritaire collecteur agréé (Opca) auquel est rattaché l’employeur. Et tant pis si ces écarts sont pour beaucoup la conséquence des priorités définies par les branches professionnelles.
En lieu et place du système actuel, les Opca perdraient leur « C » : la collecte des contributions pour le CPF (0,2 % de la masse salariale aujourd’hui) serait assurée par les Urssaf et les fonds atterriraient à la Caisse des Dépôts.
L’unité de mesure passerait en euros ou en points, ce qui permettrait de s’adresser à un organisme de formation sans intermédiaire, ce à quoi s’opposent les partenaires sociaux. Aujourd’hui « 50 heures de CPF valent entre 2.500 et 3.500 euros. Si on bascule tout à la CDC, ces mêmes 50 heures n’en vaudront plus que 1.000 », fait valoir la CFDT.
Vers un contrôle renforcé de l’Etat
Pour certains, le big bang de Muriel Pénicaud irait encore plus loin puisque ce serait l’ensemble des cotisations formation des entreprises qui passerait par le couple Ursaff-CDC : celles pour le CPF, pour l’alternance, les fonds mutualisés… ne laissant aux Opca d’autre choix que de se transformer en sociétés de conseil agrémentées, le cas échant, de la gestion des fonds conventionnels lorsque les branches ont décidé d’aller au-delà des contributions légales.
« Attention ce n’est pas encore arbitré », tempère un acteur du dossier qui pense que les Opca conserveraient la gestion des fonds alternance et ceux mutualisés pour les TPE. Quel que soit le point d’arrivée, le vent de l’histoire va clairement vers un contrôle renforcé par l’Etat.
Alain Ruello