Les émotions sont centrales dans la relation que l’on crée avec ses interlocuteurs. Un terrain sur lequel l’intelligence artificielle ne peut pas rivaliser avec nous.
L’un des aspects les plus troublants de ChatGPT est qu’il va venir se substituer à des métiers intellectuels.
Depuis les machines à tisser, les révolutions technologiques sont toujours venues perturber des métiers manuels ou à faible valeur ajoutée. Lorsque le péage automatique permet de sortir de leur guérite des centaines de salariés pour s’orienter vers un métier moins répétitif, il faut certes gérer leur reconversion. Mais le sentiment général est que l’on va dans le sens du progrès.
Lorsqu’on nous dit que l’intelligence artificielle (IA) va remplacer les journalistes, les avocats ou les médecins avec une plus grande fiabilité, se pose une question plus inquiétante : quelles activités professionnelles stimulantes et à forte valeur ajoutée vont demeurer ? D’autant que le buzz omniprésent sur le remplacement du travail humain par les outils utilisant l’IA, contribue encore à la crise du rapport au travail. A quoi bon s’investir si nous sommes, à terme, tous remplacés par des machines ?
Nos émotions comme avantage durable
Avec la somme des informations concernant un patient, l’IA peut faire un diagnostic médical. En revanche pour l’annoncer au patient, pour l’accompagner, pour qu’il puisse exprimer ses inquiétudes en se sentant entendu et soutenu, la valeur ajoutée de l’humain est, pour l’instant, très supérieure.
Il en est évidemment de même dans le domaine du management. L’IA peut être très utile dans le suivi individuel des collaborateurs de façon à s’ajuster au mieux à leurs spécificités. Mais elle ne remplacera jamais la qualité relationnelle qui les mettra en confiance, les encouragera à oser et leur permettra de s’épanouir dans ce qu’ils font au quotidien.
Rappelons que les avantages durables que nous avons sur l’IA sont nos émotions. Si l’IA peut les mimer et les détecter, en revanche elle ne peut pas les ressentir car pour cela il faut disposer d’un corps.
Ces émotions sont centrales dans la relation que l’on crée avec ses interlocuteurs. Car elles en constituent l’armature. Pour connaître la qualité relationnelle que l’on a avec quelqu’un de son entourage, il suffit d’interroger ses émotions.
La bonne nouvelle de l’IA est qu’elle va valoriser toutes les professions qui nécessitent de ne pas se limiter à une pure expertise. La compétence professionnelle sera de l’utiliser pour nourrir et amplifier son savoir, d’en faire des synthèses et de prendre position. Mais c’est dans l’usage du savoir de l’IA, à travers ses relations avec des tiers, que l’humain apportera une vraie différenciation.
Par Eric Albert (associé gérant d’Uside)