La jeunesse est considérée comme un risque. L’exposer à des responsabilités nouvelles permet de révéler son potentiel.
La nomination de Gabriel Attal comme Premier ministre a donné lieu à d’innombrables commentaires sur son âge. Sa jeunesse est considérée comme un risque pris par le Président. N’ayant pas une vie de réalisations derrière lui, comment peut-il assumer une charge aussi importante ? Cet épisode résonne étonnamment avec ce qui se passe dans l’entreprise. Malgré les programmes de développement des talents, on voit peu d’entre eux nommés jeunes dans des très grandes responsabilités. Au moment de choisir à qui attribuer les postes clés, la plupart du temps, les décideurs, imprégnés de leur propre expérience, considèrent qu’il est trop tôt pour les nommer.
Performances passées, potentiel futur
Ces décisions reposent, d’une part, sur la conviction que les performances passées prédisent le potentiel futur. Et d’autre part, que la maturité ne vient qu’avec des décennies d’expérience et une multiplicité de situations auxquelles avoir été exposé.
De fait, les performances permettent de valider que certaines qualités et compétences sont bien présentes. On peut ainsi constater, par exemple, une intelligence des situations, des capacités relationnelles ou un impact sur les équipes.
Mais le piège serait de considérer que la réussite dans des conditions passées prédit celle du futur. Concernant la maturité, certains l’acquièrent beaucoup plus vite que d’autres.
Le cas de tous les entrepreneurs
Le potentiel est un pari. Il repose, en grande partie, sur la capacité d’adaptation d’un acteur aux contextes nouveaux. De ce point de vue, beaucoup de ceux qui ont accumulé de l’expérience, ont aussi perdu leurs capacités d’adaptation.
A force de vouloir interpréter les événements qui se produisent à l’aune de ce qu’ils ont déjà vécu, ils n’en voient pas toutes les spécificités. Pis, ils cherchent à leur appliquer les recettes anciennes qui ont marché dans le passé. Pour certains l’accumulation d’expériences conduit à une vieillesse mentale.
On ne peut mesurer la réalité du potentiel d’un acteur qu’en l’exposant « trop tôt, pas prêt » à des responsabilités nouvelles. C’est dans ces situations que l’on voit ce qu’il donne vraiment. Notons que c’est le cas de tous les entrepreneurs. Celui qui se lance avec énergie et audace n’est évidemment jamais prêt. Cela n’empêche pas d’investir sur lui et son projet.
Les dirigeants qui se plaignent souvent de n’avoir pas suffisamment de relève, devraient prendre plus de risques en ce qui concerne les talents qui les entourent afin de révéler véritablement leur potentiel. Cela suppose qu’ils acceptent que les générations nouvelles ne passent pas par les mêmes parcours qu’eux.
Par Eric Albert (associé gérant d’Uside)