Adoptée en France en 2017, la loi qui permet de mieux séparer la vie privée de la vie professionnelle a fait école chez nos voisins, se félicite le « Financial Times ». Mais la crise sanitaire et le télétravail ont eu tendance à faire reculer les bonnes pratiques.
Le « Financial Times » tresse des lauriers à la France sur le droit à la déconnexion. Le journal de référence des milieux économiques britanniques salue son « rôle pionnier » sur la nécessaire délimitation entre vie professionnelle et personnelle en adoptant une loi en ce sens dès 2017. « La France a été le premier pays à accorder le droit aux employés de déconnecter de leur travail durant leurs temps de repos. Aujourd’hui, l’idée est reprise dans toute l’Europe », explique le journal, citant l’adoption de législations similaires en Italie, en Espagne, au Portugal et en Belgique, tandis que l’Union européenne travaille également à un projet de directive sur ce thème.
Les entreprises françaises de plus de 50 salariés ont l’obligation de réguler au mieux l’usage des outils numériques par leurs salariés, afin que ceux-ci ne croulent pas sous des mails le soir et le week-end et qu’ils soient légalement protégés s’ils ont éteint leur smartphone durant ce temps personnel.
Les limites de législation
Si le journal se penche sur ce sujet, c’est parce que la crise sanitaire a remis en lumière la question des frontières poreuses entre vie privée et professionnelle. « La pandémie a fortement augmenté le nombre de personnes travaillant de manière flexible en télétravail, révélant les limites de la législation pour résoudre l’intrusion du travail sur le temps personnel. »
Il cite une étude du consultant Empreinte Humaine montrant que le niveau de stress a bondi parmi les salariés en France, avec un tiers d’entre eux qui ont développé des signes de burn-out, trois fois plus qu’avant l’apparition du Covid. Et la situation est encore plus marquée chez les managers : bien que la grande majorité soit favorable au droit à la déconnexion, un sondage commandé par la CGT indique que trois quarts d’entre eux restent connectés pendant leur temps de repos.
Aider les employés à tracer les limites
« Au-delà du droit de déconnecter, les entreprises doivent réfléchir comment promouvoir le devoir de couper. Cela signifie aider leurs employés à apprendre à fixer des limites grâce à des formations et des campagnes de sensibilisation », explique le « Financial Times ».
Bruno Mettling, ancien DRH d’Orange désormais à la tête du consultant en management Topics, avance un exemple de situation où le droit à la déconnexion doit s’imposer. « C’est quand vous êtes tenté d’envoyer un e-mail parce que vous avez enfin cinq minutes le week-end pour répondre à quelque chose que vous avez reçu le vendredi. Il faut qu’une sonnette d’alarme se déclenche dans votre tête disant : ‘Tu vas seulement déranger ton collègue, ça peut attendre.’»
Par Pierre Demoux