Alors que l’AI Action Summit organisé à Paris les 10 et 11 février s’annonce comme une grand-messe mondiale, les salariés pourraient avoir intérêt à s’intéresser de près à l’intelligence artificielle. Au travail, les utilisateurs de l’IA gagnent en moyenne 57 minutes par jour, révèle une étude réalisée par Odoxa.
Demander à ChatGPT de trier une liste d’adresses e-mail par ordre alphabétique, de rechercher des chiffres précis dans un long document PDF, de faire une présentation à partir d’une étude ou encore de rédiger un e-mail « ferme mais poli » à destination d’un client qui tarde à régler ses factures… Au bureau, l’intelligence artificielle peut faire gagner en efficacité sur de nombreuses tâches.
Reste à savoir écrire des « prompts » : ces instructions destinées à l’agent conversationnel. Car la manière dont les demandes sont formulées influe beaucoup sur la qualité des réponses fournies. « Un LLM (Large Language Model), c’est un peu comme un stagiaire bizarre. Il est dévoué, brillant, il a une mémoire incroyable, mais des fois, il fait des choses très étranges, donc il ne faut pas se fier à son bon sens, mais être très précis dans ses demandes », résume Yann Gabay, cofondateur d’Oreegami et formateur en intelligence artificielle.
Toutes les professions intellectuelles risquent d’être bouleversées par l’arrivée de l’IA, assure cet observateur du secteur. « Ceux qui utilisent l’intelligence artificielle seront trois à quatre fois plus productifs que les autres, donc ça va devenir compliqué pour ceux qui ne l’utilisent pas », explique Yann Gabay.
Le gain de temps est en effet estimé à 57 minutes par jour en moyenne par les utilisateurs de l’IA, selon une étude Odoxa publiée ce vendredi et menée auprès d’un panel de 2.000 participants. Les salariés ont donc tout intérêt à se former à l’écriture de prompts.
« C’est une compétence qui sera de plus en plus différenciante et recherchée », confirme Séverine Loureiro, directrice du Lab RH, une association de promotion de l’innovation RH.
Éviter les « hallucinations » de l’IA
Mais alors, qu’est-ce qu’un bon prompt ? « Il faut développer une manière d’écrire où on est précis dans ses demandes et où l’on met du contexte », résume Yann Gabay. Savoir prompter, c’est aussi connaître les limites de l’intelligence artificielle. « Ce n’est pas un moteur de recherche », martèle le formateur, puisque c’est en le comparant à Google qu’on risque d’assister aux « hallucinations » de l’agent conversationnel – c’est-à-dire que le robot, faute de connaître la réponse, va en inventer une…
Un LLM, c’est un peu comme un stagiaire bizarre. Il est dévoué, brillant, il a une mémoire incroyable, mais il ne faut pas se fier à son bon sens.
Yann Gabay, formateur en IA
Par exemple, il ne faut pas simplement demander à l’IA : « Écris-moi un post sur l’importance de bien manger. » Mais plutôt lui dire : « Agis comme un copywriter professionnel spécialiste de la nutrition, mon objectif est de cibler sur Instagram des personnes qui doivent mieux manger et je veux les amener à consulter mon site Web », illustre Yann Gabay. Une vérification humaine reste bien sûr nécessaire puisque, même avec un bon prompt, « on n’évite pas à l’IA de faire des erreurs », rappelle le spécialiste. En revanche, cela peut faire gagner un temps précieux pour arriver au résultat désiré.
Alors que les entreprises françaises s’attellent à dompter ce nouvel outil – 12 % des salariés français utilisent l’IA au travail, selon une étude Odoxa réalisée pour Artefact -, les connaissances en écriture de prompt ne sont pas encore clairement identifiées par les recruteurs.
« Si l’on commence à voir des compétences liées à la maîtrise de l’IA dans certaines offres d’emploi, la recherche explicite de prompt engineering est encore timide », observe Séverine Loureiro, qui note toutefois que « certaines grandes entreprises commencent à former leurs collaborateurs à cette compétence ».
C’est notamment le cas chez Natixis, où « 100 % des collaborateurs y ont été formés », assure Cristel Guillain, directrice Talents & Transformation et DRH de la banque d’investissement. Une pratique encore minoritaire « qui pourrait très vite évoluer », estime l’observatrice du secteur des ressources humaines. La moitié (47 %) des utilisateurs actuels de l’IA estiment avoir besoin de compétences supplémentaires pour exploiter cet outil, révèle l’étude Odoxa pour Artefact.
Sarah Dumeau