Les grandes entreprises considèrent trop souvent la transformation digitale comme une évolution technique, sans modifier leur façon de travailler.
« Une petite dizaine d’entreprises du CAC40 sont sérieusement engagées dans une démarche de transformation ». La conclusion du cabinet Lecko sur l’état des usages collaboratifs dans les grandes entreprises françaises est surprenante. L’évaluation comparative de la transformation interne de ces grandes organisations met en évidence un retard à enclencher la deuxième phase de la mutation, celle qui permet d’aller au-delà de la modernisation des activités.
Equilibre entre vision, ambition et exécution
« Certaines entreprises technologiques, comme Safran ou Capgemini, appréhendent le digital comme une évolution technique, mais ne donnent aucun signe d’évolution plus structurelle, dans leur façon de travailler, de s’organiser et d’innover », analysent ainsi les auteurs de l’étude, intitulée « Etat de l’art de la transformation interne des organisations ». Les groupes Lafarge et Danone, considérés comme très volontaristes il y a plusieurs années, « se sont endormis », estiment-ils par ailleurs.
En dépit de ce bilan, les travaux de Lecko ont identifié les meilleures pratiques de transformation. Ainsi, « AccorHotels présente le meilleur équilibre entre vision, ambition et exécution dans sa transformation digitale ». Outre l’exposition du « shadow comex » – mais certains jugeront qu’il s’agit davantage de communication que de stratégie numérique – l’entreprise a montré qu’elle réagissait rapidement face aux perturbateurs de marché. Ils ont notamment fait preuve d’innovation en créant avec un fournisseur, Microsoft, un réseau social sur une technologie hybride, soulignent les auteurs.
Le groupe AXA a, lui, fait évoluer ses process, de la commercialisation à la gestion d’un sinistre, en passant par l’évaluation du risque grâce à l’analyse des données, tandis que la relation entre l’assureur et l’assuré s’effectue de plus en plus en ligne et en autonomie. « AXA Drive est une illustration traduisant cette évolution », expliquent-ils en évoquant le volet préventif de l’application « d’aide à la conduite », qui permet de mieux connaître les usages de ses assurés afin de personnaliser l’offre.
BNP Paribas se place au sixième rang du classement de Lecko, bien que pénalisé par la faiblesse de ses outils collaboratifs. Le groupe bancaire a décidé l’année dernière d’investir 3 milliards d’euros dans la transformation digitale de l’entreprise, rappelle l’étude. « L’objectif est simple : mobiliser les nouvelles technologies et les modes de travail plus collaboratifs et agiles, pour des expériences clients plus fluides, plus simples et des collaborateurs plus performants », confiait ainsi il y a un an aux « Echos », le PDG du groupe bancaire Jean-Laurent Bonnafé.
Total, de son côté, a engagé des programmes d’acculturation et d’accompagnement de ses collaborateurs. Le programme « Passeport digital pour tous » a été suivi par plusieurs dizaines de milliers de personnes dans le groupe, tandis qu’un tiers des dirigeants bénéficiaient de « reverse mentoring ».