Quelles sont les principales mesures annoncées par la ministre du travail, Muriel Pénicaud, sur la réforme de la formation professionnelle ? Pouvons-nous parler d’un Big bang ?
Je retiens de la réforme annoncée cinq mesures importantes :
1/ Le compte personnel de formation (CPF) des salariés sera crédité en euros et non plus en heures. Actuellement, les salariés bénéficient d’un crédit de 35 heures par an avec un plafond de 400 heures. Ce crédit va devenir 500 euros par an et pourra atteindre 5000 euros au bout de dix ans. Et pour les salariés non qualifiés, le crédit de 55 heures par an avec un plafond de 800 heures deviendra 800 euros avec un plafond de 8000 euros. Cette mesure rend la formation plus claire et accessible pour tous les salariés.
2/ La création d’ici fin 2019 d’une application mobile pour moncomptedeformation.fr : l’application permettra à chaque salarié de consulter le solde de son CPF en ligne, de choisir une formation à proximité, de lire des avis des personnes qui ont déjà suivies la formation, de réserver et de payer en ligne. Cela va également dans le sens d’une simplification.
3/ Une solidarité financière des grands groupes à l’égard des TPE-PME afin que leurs employés aient les mêmes droits. Le gouvernement souhaite mettre en place un plan de formation financé par une contribution de l’ensemble des entreprises mais réservé aux TPE et PME. Ce système devrait faciliter l’accès de tous les salariés à la formation alors qu’actuellement ce sont surtout les salariés des grandes entreprises qui en bénéficient.
4/ L’Urssaf sera chargé de collecter une seule cotisation pour financer la formation professionnelle. L’Urssaf se substitue donc aux organismes paritaires collecteurs agréés (Opca) qui assurent actuellement la collecte. Les Opca devraient devenir des opérateurs de compétences.
5/ La création d’une agence nationale de régulation de la formation professionnelle et de l’apprentissage nommée « France compétences » qui remplacera le Copanef, le Cnefop et le FPSPP. Là encore, c’est une mesure de simplification. France compétences qui sera composée d’une gouvernance avec l’Etat, les partenaires sociaux et les régions sera chargée de labéliser les formations et d’encadrer les prix. Les organismes de formation devront être certifiés. C’est également une mesure qui contribue à apporter plus de garanties aux salariés.
Est-ce donc une bonne réforme ? A qui va-t-elle profiter ?
Deux axes forts ressortent de la réforme :
1/ Les droits des salariés sont renforcés
2/ L’Etat renforce son rôle
La future réforme de la formation professionnelle devrait d’abord profiter aux salariés et aux demandeurs d’emplois : le crédit en euros, l’application mobile, l’accessibilité aux offres sont des mesures qui vont simplifier les démarches des apprenants. C’est une bonne nouvelle.
La ministre du travail qui a dénoncé le système actuel comme un système qui accentue les inégalités entre les salariés et entre les actifs et les demandeurs d’emplois, souhaitait rééquilibrer l’accès aux formations. Actuellement, les salariés diplômés sont bien formés alors que les ouvriers suivent peu de formations. Cette différence d’accès aux formations existe également entre les actifs et demandeurs d’emplois.
La réforme s’attaque à ces inégalités de traitements. Si les salariés devraient renforcer leurs droits, à l’inverse, les OPCA jugés opaques et avec un système trop complexe seront les grands perdants de la réforme. Leurs missions devraient s’orienter vers la prospective des métiers, la co-construction des diplômes professionnels et le financement des CFA. Ce nouveau périmètre ne semblent satisfaire les syndicats de salariés et patronaux.
Simplification et clarification de la formation professionnelle mais est-ce que les salariés seront également mieux accompagnés dans leurs projets personnels ?
La réforme prévoit de modifier le Conseil en évolution professionnelle qui aura pour mission d’accompagner gratuitement toute personne qui le souhaite dans son parcours professionnel.
Cela va dans l’intérêt des salariés. En revanche, prévoir un seul CEP par région me semble insuffisant pour pouvoir proposer un accompagnement personnalisé à tous les salariés. Des ajustements sont donc à prévoir. C’est tout l’enjeu des négociations qui vont s’engager entre le gouvernement et les différentes parties prenantes d’ici la proposition de loi prévue pour le mois d’avril.